L’engouement pour le logiciel libre dépasse depuis plusieurs années le cadre de la petite communauté de techniciens et génère aujourd’hui une forte demande de spécialistes avec de nombreuses créations d’emplois à la clé. Jusqu’à présent, le marché mondial était tiré par les pouvoirs publics : tous les mois, des gouvernements et des services publics annoncent leur conversion vers l’Open Source. Le Canada a pris du retard et commence à peine à autoriser le choix entre les logiciels libres et les logiciels propriétaires. Toutefois, le Canada possède des conditions favorables (pénétration avancée des réseaux à large bande, degré élevé des connaissances des technologies de l’information et de la communication dans les secteurs publics et privés) qui lui permettront de rapidement combler l’écart.
Avant d’aborder la question des opportunités dans le logiciel libre pour l’utilisateur, le fournisseur et le développeur, essayons d’en savoir un peu plus sur ses caractéristiques et ses applications.
Les caractéristiques du logiciel libre
Un logiciel libre est défini comme tel par la Free Software Foundation (FSF) et le projet Debian s’il répond aux libertés d’exécuter le programme par tous les usages, d’étudier le fonctionnement du programme, de redistribuer les copies et d’améliorer le programme. Ainsi, le logiciel libre est développé sous une licence Open Source, la plus connue étant GPL (General Public License), qui s’assure que personne ne peut s’approprier le code source.
La grande caractéristique du logiciel libre est qu’il est « free as in free speech not as free beer ». La confusion entre liberté et gratuité est née de l’anglais qui est ainsi obligé de préciser que le logiciel est « libre comme la liberté d’expression et non comme la bière ». Il est vrai que le logiciel libre est gratuit sur Internet, mais les sociétés de services en logiciel libre (SS2L) ont le choix de le facturer ou non.
Le monde du logiciel libre se retrouve dans de nombreux domaines : les infrastructures pour les réseaux locaux et Internet (serveurs Web, de fichiers, d’impression, de courriels, de bases de données), les applications Web de type collaboratif, les logiciels libres dans des environnements avec des systèmes d’exploitation propriétaires (navigateur Internet Firefox, Open Office pour la bureautique) et enfin les systèmes d’exploitation et les logiciels libres tels que Linux.
L’envolée des logiciels libres n’est plus à démontrer, les chiffres parlent d’eux-mêmes : 70 % des serveurs Web mondiaux utilisent Apache, croissance annuelle de 35 % pour les serveurs Linux, 25 % des solutions proposées par IBM sont des solutions Linux, multiplication par dix des vendeurs spécialisés Linux chez IBM en quatre ans.
Les bénéficiaires du logiciel libre
La croissance du marché des logiciels libres est bénéfique pour plusieurs acteurs : Les utilisateurs, les fournisseurs de matériels et les salariés évoluant dans les SS2L.
Pouvoirs publics, éducation, santé et dorénavant le secteur privé s’orientent de plus en plus vers le logiciel libre. Les principales raisons en sont le coût à 25 %, la souplesse et l’autonomie à 23 %, la sécurité à 18 % et l’amélioration de la productivité à 17 %. Il est vrai que le coût des licences réduit à néant permet au client d’investir davantage dans les services, qui eux sont facturés. L’utilisateur voit aussi dans les logiciels libres un avantage en ce qui concerne le maintien de la solution, la pérennité de l’application, car son développement ne dépend plus d’une personne en particulier. De même, les bogues et les failles sont immédiatement corrigés contrairement à ce qui peut se produire pour les licences propriétaires.
Les fournisseurs voient également une opportunité d’affaires avec l’essor du logiciel libre. Les SS2L, principaux protagonistes, offrent une variété de services à leurs clients pour qu’ils retrouvent tout le « confort » des logiciels propriétaires : assistance, conseil, formation, intégration et développement. Les entreprises « classiques » veulent également tirer parti des projets libres en souhaitant les diriger. Les entreprises qui interagiront avec les communautés de développement des logiciels libres en tireront le meilleur profit. C’est pourquoi déjà plus de 35 % des éditeurs canadiens de logiciels propriétaires proposent des logiciels libres : le client a ainsi le meilleur produit au meilleur prix. Le logiciel libre a permis de développer une nouvelle économie de « cooptation », comprenez coopération associée à compétition. Ainsi, les entreprises mutualisent les coûts de recherche et développement et se concurrencent sur les services offerts.
Les derniers à être bénéficiaires du marché des logiciels libres, et non des moindres, sont les salariés. En effet, les SS2L conservent le meilleur des start-up, à savoir un environnement de travail sympathique, un potentiel de développement de carrière et un sens du travail accompli. On y remarque un retour à la responsabilisation, à la participation et à l’implication aux différentes étapes telles que l’innovation, le développement et le déploiement. Dans les entreprises traditionnelles, on fonctionne selon un mode hiérarchique où la recherche du statut est omniprésente et le chef joue le rôle d’arbitre. Dans les SS2L, le mode de fonctionnement est tout autre : les compétences constituent le moteur, et les échanges permettent de trancher. Linus Torvalds, le fameux initiateur de Linux, montre ainsi qu’on peut mener à bien un projet en laissant chacun s’exprimer, indépendamment de sa nationalité, de son diplôme, de son âge. On accepte ainsi des initiatives concurrentes (voire hostiles) sans arbitrer prématurément ni définitivement, et cela renforce le projet.
Le monde du logiciel libre offre de multiples possibilités pour les différents acteurs. De nouveaux métiers vont voir le jour dans les logiciels libres, en technique comme en marketing, pour accompagner la croissance de ce secteur, pour initier les hauts dirigeants aux modèles d’affaires des logiciels libres,