Quelque cinq années après que la France s’eut dotée d’une loi sur le droit à la déconnexion, une première province canadienne a légiféré. Depuis le 2 juin, les entreprises ontariennes comptant 25 salariés ou plus sont tenues d’avoir une politique écrite de déconnexion – une première en Amérique du Nord.
Concrètement, la loi ontarienne définit la déconnexion comme ce qui suit : « Le fait de ne pas transmettre de communications (courriels, appels, messages) à l’extérieur des heures de travail, de manière à être déconnectés du travail. »
Bien qu’il s’agisse d’une avancée, la chroniqueuse économique Marjorie April émet un bémol. En entrevue à l’émission C’est jamais pareil, elle précise que cette loi ne couvre que 60 % de la main-d’œuvre de la province. De plus, celle-ci n’empêche pas les entreprises d’inclure des exemptions dans leur politique.
Qu’en est-il au Québec ?
Dans le Bilan 2021 de l’emploi au Québec de l’Institut du Québec, on peut lire : « Statistique Canada révèle qu’en janvier 2022, près du quart des Canadiens (24, %) travaillaient désormais exclusivement à partir de leur foyer. » Bien que l’hyperconnectivité ne touche pas exclusivement les télétravailleurs – la main-d’œuvre possédant des outils de travail mobile (téléphone d’entreprise, ordinateur portable, etc.) aussi –, ceux-ci sont les plus directement touchés par l’enjeu de la déconnexion. En ce sens, une étude de la firme canadienne LifeWorks, menée auprès de 3 000 répondants en mars 2022, démontre que « plus du quart (28 %) […] disent avoir du mal à décrocher après leurs heures de travail. Un grand nombre d’entre eux (40 %) se sentent épuisés mentalement ou physiquement à la fin de la journée. »
Interviewée pour l’article Le droit à la déconnexion au Québec?, Me Marianne Plamondon, avocate, associée chez Langlois Avocats à Montréal, spécialisée en droit du travail et de l’emploi, indique que le Québec devrait bientôt suivre l’exemple de l’Ontario : « Les employeurs aiment avoir des politiques uniformes quand ils ont des sites dans différentes provinces. » Elle poursuit en précisant qu’« [i]l y aura des politiques de déconnexion qui vont s’appliquer au Québec, alors que ce n’est pas requis par la loi ici ».
Au cours des derniers mois, le Québec a vécu une campagne électorale au terme de laquelle la Coalition Avenir Québec a été reconduite au pouvoir. La nouvelle législature de l’Assemblée nationale tiendra sa première session parlementaire le 29 novembre 2022. Un projet de loi sera-t-il présenté cet automne ? Les défenseurs de la santé mentale souhaiteront sans doute faire avancer le dossier…